· 

Souvenirs d'aujourd'hui - Chapitre 3


Jour 3

Jour 1.

 

            J’écris dans un journal que je ne connais pas, dans une pièce que je ne connais pas, un jour dont je ne connais pas la date. Ma tête est vide, je ne peux me souvenir de rien. Je me suis réveillée dans ce cagibi minuscule, recroquevillée sur un fauteuil. C’est à peu près tout ce que peut contenir cette pièce, à peine plus grande qu’un W.C.

            Sur l’un des bras était posé ce journal, et sur l’autre un sachet avec des barres de céréales et une bouteille d’eau. Il n’y a même pas de quoi faire ses besoins. Comment je vais faire ?

            Il fait chaud. J’étouffe. Je ne comprends pas ce que je fais ici. La porte ne s’ouvre pas. J’ai peur. Je peux à peine me mettre debout, je ne peux faire qu’un pas, coincée entre le fauteuil et le mur. Je sens des fourmillements dans tout mon corps. Je sens la panique monter.

            J’ai essayé de m’étirer, de me dégourdir comme je pouvais. Mais impossible ne serait-ce que d’étendre mes bras sur les côtés, les murs m’en empêchent. Je sens des picotements dans mon visage, dans mes doigts, j’ai du mal à respirer. Mon rythme cardiaque me paraît erratique.

            Je ne sais pas qui je suis. Je pourrais très bien être cardiaque sans le savoir. Je sens un poids sur ma poitrine. Je n’arrive pas à respirer. Je n’arrive plus à respirer ! Je vais mourir ici, sans même savoir qui je suis ou comment je m’appelle. Je suffoque. Je suffoque, mon cœur s’emballe. Je crois que c’est la fin.

 

 -----

 

            Je suis toujours là. J’ai attendu la mort. Elle n’est pas venue. Et peu à peu la crise est passée. Je suis toujours enfermée dans cette atroce boîte à chaussures, mais je ne me sens plus sur le point de mourir d’une seconde à l’autre. J’ai mangé les barres de céréales et bu un peu, mais maintenant j’ai envie de faire pipi.

            Je me retiens autant que je peux. Mais il viendra un moment où ça ne sera plus possible. Quel cauchemar ! Pourvu que je sois seulement en train de faire un mauvais rêve. Qui me fait ça ? Et pourquoi ? Combien de temps va-t-on me garder ici ? Qu’est-il arrivé à ma mémoire ? Où sont mes souvenirs ?

            Visiblement quelqu’un me fournit de quoi boire et manger. Alors pourquoi m’enfermer dans une pièce aussi exiguë ? À moins que j’ai ramené cette nourriture moi-même ? Bon sang, je ne tiens plus. Je vais devoir trouver un coin de cette minuscule pièce où je puisse me soulager.

 

 -----

 

            Voilà c’est fait. C’est incroyablement humiliant. Je me sens comme un animal abandonné dans sa cage, qu’on laisse patauger dans ses excréments. Oh je n’en suis pas tout à fait là, mais qui sait pour quelle durée je vais encore être coincée ici ? J’ai peur des extrémités auxquelles je pourrais être contrainte d’arriver.

            Je ne comprends pas, rien ne me paraît logique. Pourquoi ce journal ? Je n’ai rien d’intéressant à dire, aucune information à donner, je ne sais même pas mon propre nom.

            On me prend peut-être pour quelqu’un d’autre. Peut-être attend-on de moi des renseignements que je n’ai pas, et que je n’ai jamais eus. Quelqu’un va bien finir par entrer en contact avec moi. Je lui expliquerai. Je lui dirai qu’il se trompe, que je ne sais rien. Il finira bien par réaliser son erreur. Oui. Ça va se résoudre. J’ai espoir.

 

            Je me demande si j’ai des enfants.

Écrire commentaire

Commentaires: 0